les maladies anciennes sont-elles des miroirs des maladies d’aujourd’hui ? 

 

Et comment les reconstruire sans anachronisme ? Telles sont les questions qui ont guidé le séminaire international en Humanités Médicales organisé par l’IHM (Institut des Humanités en Médecine) à Lausanne, le 18 décembre 2024 auquel Myriam (biologiste), postdoctorante dans notre projet ArchiMed, y participait aux côtés de Pierre-Olivier Méthot (philosophe, Université Laval, Quebec) et Guillaume Linte (historien, Université de Lausanne). L’enjeu est de taille à l’ère du numérique où préserver le passé se heurte à la construction d’un avenir informatisé. Le texte ci-dessous permet de résumer les points clefs qui ont été abordés durant les présentations et lors des échanges entre les participants et le public.

 

Quelques définitions élémentaires sont apportées premièrement par Pierre-Olivier, introduisant de manière éclairée les projets de recherche en sciences et histoire des deux intervenants suivants, ayant en commun le défi historiographique.

Mirko D. Grmek, médecin et historien est cité pour avoir élaboré le concept de pathocénose désignant l’état d’équilibre des maladies à une époque donnée et dans une société donnée : la présence et l'importance d'une maladie dépendent de celles des autres maladies (ouvrage pour aller plus loin : « Les maladies à l’aube de la civilisation occidentale »). Ainsi, est-ce que la peste d’Athènes décrite à l’époque de la Grèce antique est la même maladie que la peste connue aujourd’hui ?

Le diagnostic rétrospectif est défini comme un ensemble de pratiques visant à identifier et caractériser les maladies dans le passé sur la base de sources écrites et non écrites. Emile Littré est un des premiers historiens à théoriser au 19e siècle cette notion, en clarifiant ce qu’il fallait faire ou ne pas faire dans cet exercice médical ancien. Charles Daremberg institutionnalisa la pratique. Plus récemment, Piers D. Mitchell (médecin, historien) publia sur les risques associés à l’interprétation de textes écrits anciens et explore la question de la pertinence de diagnostic biologique moderne pour des événements pathologiques passés (« Retrospective diagnosis and the use of historical texts for investigating disease in the past », International Journal of Paleopathology, 2011). Enfin, l’anachronisme, ou regarder le passé avec les yeux du présent, est un des risques majeurs du diagnostic rétrospectif, à savoir corriger les perceptions du passé avec nos connaissances actuels.

Myriam et Guillaume présentent alors leurs projets de recherche respectifs mettant en pratique les notions définies précédemment autour du diagnostic rétrospectif et penser les maladies d’aujourd’hui dans le passé. La conclusion commune est la nécessité d’un travail multidisciplinaire, l’analyse de l’historien dépendant de l’expertise du biologiste et inversement. C’est ce qui est mis en place au sein d’ArchiMed.

 

Nous remercions Aude Fauvel pour être à l’initiative de ce séminaire et Vincent Varlet pour l’animation et la modération du débat.

 

Lien de l'évènement 

 

Crédit photo : Examen de la momie du Pharaon Ramsès II au Musée de l'Homme, à Paris, le 11 novembre 1976 (Tomy Comiti)

 

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14 janv. 2025

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